Réalité étendue en classe : le pari gagnant de l’apprentissage du futur ?
Et si la réalité étendue transformait l’enseignement ? La XR (réalité étendue) regroupe la réalité virtuelle (VR), la réalité augmentée (AR) et la réalité mixte (MR). Selon une étude du National Training Laboratory, elle permet aux apprenants de retenir jusqu’à 75 % des informations, contre 10 % avec les méthodes d’apprentissage traditionnelles. Un atout pédagogique qui séduit les professionnels de l’éducation. Jennifer Abou Hamad, enseignant-chercheur à l'IGS-RH, a donc intégré cette technologie en plongeant ses apprenants en Ressources Humaines dans des simulations d'entretiens virtuels.

Plongée dans la XR : en terre inconnue
Aya met son casque de réalité virtuelle… L’atmosphère dans la salle est à la fois curieuse et excitée. Depuis 2023, le Groupe IGENSIA Education intègre la réalité étendue (XR) dans ses parcours et méthodes d’apprentissage, amorçant ainsi une évolution pédagogique. Les apprenants en deuxième année de Bachelor Ressources Humaines et Transformation Digitale, impatients de découvrir cette nouvelle méthode d’apprentissage, partagent leurs premières impressions.
Emma n’a jamais expérimenté un cours en réalité étendue. Elle est intriguée, mais aussi un peu surprise par cette approche innovante. À côté d’elle, sa camarade Aya partage : « Le cours en XR peut être un bon entraînement, car on peut se tromper sans conséquences, ce qui nous permet d’apprendre sans pression. »
Leurs attentes sur ce module axé sur les techniques d’entretien ? Explorer ce que pourrait être le recrutement du futur. Aya ajoute : « C’est bien de moderniser tout ça, de découvrir de nouvelles techniques d’apprentissage. » Ce sentiment de curiosité est partagé par Nicolas Planel, chef de projet digital au sein de la Direction Digital Learning. Selon lui, l’utilisation de nouvelles modalités d’apprentissage comme la réalité étendue permet non seulement de diversifier les approches pédagogiques, mais aussi d'améliorer la rétention d’informations et d’enrichir l'expérience cognitive des apprenants : « C’est essentiel de varier les méthodes pour stimuler le cerveau de manière différente », conclut-il.
Apprendre en enfilant un casque… bonne idée ou pari trop osé ?
Jennifer Abou Hamad observe ses apprenants, impatients de commencer. Ses cours sont toujours interactifs, remplis de simulations et de jeux de rôles. « Je privilégie l’interactivité dans mes enseignements. Quand cette opportunité s’est présentée au sein du Groupe, je me suis dit que c’était l’occasion de rendre les jeux de rôles encore plus réels, d’ajouter une dimension supplémentaire avec la XR. »
Pour cette chercheuse en sciences de gestion, l’un des plus grands avantages de la réalité étendue en pédagogie est la possibilité de plonger les étudiants dans des situations tangibles. « La XR crée un environnement immersif où les étudiants s'approprient la situation. Le cadre, les images autour d’eux, même les bureaux virtuels… Tout cela leur permet de se projeter plus facilement et de rendre l’expérience beaucoup plus concrète. » Cette approche offre un moyen puissant de rendre les simulations plus réalistes et engageantes pour les apprenants.
Avant de promouvoir les bienfaits de la réalité étendue, Jennifer Abou Hamad explique : « Les modalités comme la réalité étendue favorisent l’engagement. » Elles offrent une expérience immersive unique. « Dans un monde où l'on est constamment distrait par nos smartphones et autres appareils, le fait de porter un casque de XR oblige l’étudiant à se concentrer pleinement. Le cerveau, trompé par la réalité virtuelle, perçoit l'environnement comme réel, ce qui permet une immersion totale et une concentration maximale. » Cette immersion, selon elle, modifie la manière dont on ressent et interagit avec l'information, offrant ainsi une expérience d'apprentissage incomparable.
Si la réalité étendue offre une immersion puissante, elle ne doit pas devenir l’unique méthode d’apprentissage. Nicolas Planel insiste sur l’importance du complément pédagogique. « Il est nécessaire que des intervenants prennent en main l’animation, comme dans ce cours. Le module XR ne doit pas être une fin en soi, mais un support à exploiter. »
L’interaction humaine reste clé : après l’expérience en immersion, un débriefing permet aux étudiants d’exprimer leurs ressentis, de structurer leurs apprentissages et de replacer les concepts dans un contexte plus large. Jennifer vient de terminer son cours sur l’employabilité : « la XR devient alors un levier, un moyen d’ancrer les connaissances dans la mémoire sur le long terme. »
Pour financer les casques, la Direction Digital Learning a bénéficié d’un soutien de l’OPCO Atlas, avec pour objectif commun de développer l’innovation pédagogique au service des apprenants. L’équipe, accompagnée par un partenaire expert dans l’intégration des technologies immersives, recueille les besoins des entités pour concevoir des maquettes pédagogiques et rendre ces outils opérationnels.
Comment maîtriser son entretien RH ? De la respiration à la technique C.A.R., un parcours en 4 modules
Emma ajuste le casque sur sa tête. Le monde réel s’efface, remplacé par un espace lumineux et apaisant. Devant elle, une instructrice en tenue de yogi esquisse un sourire bienveillant. Autour d’elle, les autres apprenants s’agitent, cherchant leurs repères. « Prenez une grande inspiration », souffle la voix de la guide. L’objectif de ce module : gérer son anxiété pour mieux performer en entretien. Une vague de calme s’installe. Les respirations ralentissent, les épaules se détendent. Une légère musique résonne en fond, subtile, presque imperceptible. « Imaginez un entretien où vous êtes confiant. Ressentez cette assurance. » L’air devient plus léger. Un apprenant expire lentement, comme si le stress quittait enfin son corps.
L’environnement bascule brusquement. Une salle d’entretien minimaliste. Devant chaque participant, une interface s’affiche : une question flotte dans l’air. « Quelles sont mes forces ? Quelles sont mes faiblesses ? » Place à la préparation de l’entretien dans ce nouveau module. Des mots-clés défilent progressivement. Créativité. Organisation. Esprit critique. À travers leurs avatars respectifs, les apprenants cliquent sur la qualité et le défaut qui les représentent le mieux, afin d’avoir un diagnostic sur la personne qu’ils sont réellement. « Regarde tes expériences passées. Qu’est-ce qui t’a rendu fier ? » Un sourire discret s’étire sur les lèvres d’une apprenante.
Nouvelle transition, nouveau module. La salle se transforme en un bureau professionnel. L’avatar d’un recruteur attend, impassible. Une question tombe : « Parlez-moi d’un défi que vous avez surmonté. » Il est temps d’appliquer la méthode C.A.R. : en plein milieu de l’écran s’affichent les explications de cette méthode : Contexte. Action. Résultat. Plusieurs choix s’offrent aux apprenants : que souhaitent-ils valoriser ? Le fait de bien avoir su gérer un conflit au travail ? Avoir réussi à boucler un dossier important en très peu de temps ? Une fois le choix sélectionné, le guide virtuel incline la tête, laissant la place à l’apprenant d’argumenter. Avant d’esquisser un large sourire, très impressionné par leur gestion de la situation. En bonus : un replay de la prestation, analysé en détail par l’IA.
Ultime changement de décor. Lumière tamisée, bureau en verre, ambiance feutrée. Face à eux, un employeur attend. « Pourquoi vous et pas un autre ? » Un silence. Quelqu’un déglutit. Une minuterie invisible tourne doucement. Les mots doivent être pesés. Un apprenant hésite une fraction de seconde, puis se lance. « Je suis convaincu que... » L’assurance grandit au fil des phrases. Quand un autre ajuste sa posture, inspiré. « Lors de mon dernier stage… » Sa voix se stabilise, gagne en assurance. Au premier rang, une apprenante serre même le poing discrètement, satisfaite de sa prestation.
Le casque se soulève. Retour à la réalité. Quelques rires nerveux, des échanges de regards. Les apprenants clignent des yeux, comme s’ils revenaient d’un voyage. « Franchement, le module sur la respiration, c’était une révélation. » « J’ai enfin compris comment structurer mes réponses. » Jennifer Abou Hamad les observe, un sourire en coin. « Alors, prêts pour vos futurs entretiens ? »
Tradition et innovation : le combo gagnant qui séduit les apprenants
Dans cette immersion totale, chaque apprenant semble se retrouver dans sa bulle, absorbé par l'expérience. C’est une expérience partagée, mais qui force chacun à se concentrer pleinement. Une fois l’expérience terminée, certains soulignent cette immersion profonde qui change la dynamique d’apprentissage. « C’était vraiment plus ludique, différent des simulations qu’on fait en cours. On voit le recrutement sous un autre angle, plus concret », confie l’une des apprenantes.
Pour beaucoup, cette méthode novatrice représente un contraste frappant avec les enseignements classiques. « Ça nous permet de nous projeter d’une manière différente, de comprendre ce que ressent l’autre côté du miroir », remarque une autre. Mais au-delà de l’immersion, ce qui frappe le plus, c’est l’adaptabilité de la méthode. « On avance à notre rythme, on peut revenir sur ce qu’on n’a pas compris », ajoute un apprenant, soulignant l’autonomie que le cours permet. Si la nouveauté présente des défis, comme une légère désorientation dans la gestion de l’espace, elle ne freine en rien l’engouement des apprenants.
Alors que l’expérience en réalité étendue fait ses preuves, une question se pose : quel format reste privilégié ? L’option traditionnelle revient en force, mais non sans reconnaissance de la modalité immersive « La XR, c’est top, mais il faut garder le lien humain, un professeur en vrai, ça reste essentiel. Mais je suis partant pour un mix, 10% de XR et 90% de réalité. Ça rajoute quelque chose, un vrai plus, » précise un apprenant.
Pour conclure, l'enthousiasme est général : « Ça mérite d’être testé par tous, vraiment. » Une apprenante le résume bien : « Peu importe le domaine, ça s’adapte à tout. L’architecture, la négociation, tout… C’est une méthode que je recommanderai à n’importe quel domaine. »
Des retours positifs, mais quel futur pour la XR dans l’enseignement ?
Interrogée sur le fait qu’elle ait ou non, observé un changement dans l’engagement ou la compréhension des apprenants, Jennifer Abou Hamad affirme que ce cours en XR a été extrêmement bénéfique : « à chaud, les retours sont déjà très positifs. J’ai vu qu’ils avaient des feedbacks qui étaient très pertinents, donc ils ont bien compris le but de l’activité en tant que telle, mais aussi le contenu. »
L’enseignant-chercheur évoque aussi le fait que les apprenants faisaient très bien « le lien entre le cours, la théorie et la pratique. Et c’est ça qui était important. Je pense que le message est bien arrivé. »
Jennifer Abou Hamad conclut en déclarant qu’elle souhaiterait intégrer plus souvent cette technologie dans ses cours : « Même si ça reste une simulation, ça rend les choses un peu plus concrètes encore. Les étudiants arrivent à faire le lien entre ce qu’on voit en cours, et ce qui peut se passer dans une situation réelle en entreprise. J’aimerais bien qu’il y ait cette méthode d’apprentissage dans chaque cours, qu’on puisse au moins faire 30 minutes de XR, une session ou un module. »
Pour donner suite à ce premier cours en réalité étendue sur les entretiens, l’enseignant-chercheur a évoqué la possibilité de nouveaux modules sur la gestion des conflits.
L’objectif à long terme de la Direction Digital Learning ? Intégrer pleinement la XR dans le cursus des écoles du Groupe IGENSIA Education, afin d'offrir une pédagogie plus immersive et innovante à ses apprenants. « Nous visons à rendre cette modalité-là plus accessible et la plus « clé en main » possible, pour qu’elle puisse être largement adoptée à la rentrée de septembre 2025, » conclut Nicolas Planel.
La réalité étendue en pédagogie offre un grand potentiel, enrichissant l’apprentissage par l'immersion et la simulation. Si des défis logistiques existent et que l’interaction humaine peut être différente, une approche hybride, combinant XR et enseignement traditionnel, permet de tirer le meilleur parti de ces nouvelles technologies tout en préservant l’accompagnement pédagogique.
Rédaction : Lauryn BIKILE.
Direction Communication Groupe IGENSIA Education.